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Queer suis-je?

Billets d'amour, d'humeur et d'humour d'une dure à queer

Ma transition est importante et légitime. Je suis agenre.

Publié le 23 Mai 2018 par Bonnie Bobby Braun

Ma transition est importante et légitime. Je suis agenre.
 
Être agenre, c'est avant tout être transgenre1.
Être agenre, c'est ne pas se reconnaître dans la binarité des genres (masculin et féminin).
 
Ce genre ou plus exactement cette absence de genre, fait partie d'une catégorie de personnes appelée non-binaires (ou N.B).
 
Être agenre, pour moi, c'est apparu dès l'école, quand j'ai commencé à me faire passer pour un garçon au CP.
J'étais déjà très androgyne à l'époque, et amoureuxse d'une fille de CM2. Je voulais qu'elle me voit masculin, alors je m'en appropriais les codes. Je courrais vite, je sautais, grimpais aux arbres, je me bagarrais. Les réactions étaient moqueuses quand on me demandait si j’étais un garçon, question à laquelle je me sentais obligé.e de répondre non.
Puis un jour en entrant dans les toilettes des filles, et en croisant le regard désapprobateur de mon amoureuse secrète, je compris que toute ma vie, on allait me renvoyer à mon sexe assigné à la naissance: vulve = fille = féminin.
 
Jusqu'à présent j'étais une personne cis3 binaire dans le déni.
Aujourd'hui je sais que je ne suis pas un homme et encore moins une femme. 
Le monde ne me propose que sa binarité et celle-ci m’angoisse et m'étouffe.
 
Pour mon look, mon expression de genre idéale correspond aux personnes androgynes.
Cette apparence ambivalente intrigue souvent les curiosités malsaines mais c'est celle qui me sied le plus. 
Poils, coupe de cheveux, maquillage, virilité, vêtements, épilation n'ont pour moi aucune appartenance de genre. Je les utilise au gré de mes envies et de mes humeurs. 
 
Je n'ai pas de dysphorie de genre2 à proprement parlé comme pourrait avoir certaines personnes transgenres, je n'ai pas de problème avec mes seins, ni avec ma vulve ou mon vagin, j'ai un problème avec le genre qu'on voudrait y rattacher.
 
Je tiens à préciser que je n'ai pas l'intention de prendre de la testostérone et je n'ambitionne pas non plus une quelconque transformation physique (pour le moment).
Les personnes non-binaires peuvent transitionner aussi bien socialement que physiquement, et cela est tout aussi légitime que les transitions d'un homme trans ou d'une femme trans.
Dire le contraire ce serait consacrer la binarité et la cisnormativité4.
 
Je suis un.e révolté.e permanent.e face au patriarcat, aux discriminations, au sexisme, aux LGBTphobies5, à ce système éducatif, à l’invisibilité des personnes trans, non-binaires et intersexes6
Dans le féminisme mainstream, je vois régulièrement passer des textes qui vantent les qualités des femmes en voulant sans cesse les ramener à celles des hommes. Les femmes peuvent, savent faire aussi bien que les hommes,...Ça reste sexiste, binaire et profondément transphobe7.
 
Je sais qu'il est trop tôt aujourd'hui, pour être agenre dans ce monde.
Agenre, c’est un mot que le correcteur d'orthographe ne reconnait pas.
Être agenre, c’est être précurseurse d’une révolution à laquelle le monde n’est pas préparé.
Quand on est transgenre dans l'imaginaire collectif actuel, on est binaire, masculin ou féminin, on choisit un genre quoiqu'il arrive, une case bien précise.
Seulement voilà être transgenre aujourd'hui c'est avoir une palette tellement plus large que cela...
 
Alors j'entends déjà les jugeant.e.s dire que c'est une mode en ce moment de faire son coming out trans ou N.B, comme le mouvement queer8 devenu trop mainstream,  mais en fait, non, ce n'est pas une mode, c'est une libération.
 
Être enfermé.e dans un corps ou dans un genre, qui, depuis l'enfance ne nous convient pas, est une aliénation, et dites vous que si de plus en plus de personnes, jeunes ou moins jeunes, font cette démarche, c'est que les schémas qu'on nous proposait jusqu'à présent, sont obsolètes et ne nous conviennent plus, et qu'en fait on s'est juste libéré.e.s de cela.
 
Alors je ne vous demanderais pas de changer vos habitudes de prénoms ou pronoms avec moi, ce coming out me permet de me libérer d'une binarité qui ne me convient plus et ne m'a jamais vraiment convenu. J'aimerais juste qu'on arrête de me genrer uniquement sur mon apparence, qu'on arrête de me rattacher au féminin continuellement.

Je suis Bonnie, je suis Bobby, je ne suis ni l'un.e, ni l'autre, ni plus ni moins qu'un tout et dans son intégralité. 
 
B.
 
 
Petit lexique pour toi lea non-concerné.e  et/ou non-initié.e:
 
transgenre1Personne dont l'identité de genre ne correspond pas à son sexe assigné à la naissance. 
dysphorie de genre2 : Etat de souffrance, malaise douloureux dû à l'inadéquation entre le sexe assigné à la naissance et le genre. 
cis3: du terme cisgenre, dont le sexe assigné à la naissance correspond à son identité de genre. 
cisnormativité4: Normes cisgenres sur lesquelles sont construites nos sociétés occidentales. 
LGBTphobies5: Rejet et discriminations envers les personnes LGBT (lesbiennes, gays, bi.e, transgenres).
intersexes6: Personne née avec des organes génitaux ne peuvant pas être définis comme appartenant à la catégorie "féminin" ou "masculin", selon les critères de la médecine actuelle.
transphobe7: Rejet et discriminations envers les personnes trans.
queer8: terme anglais signifiant « étrange », ou « bizarre ».
Ce terme est une réappropriation apparue à partir des années 80  pour regrouper les identités non-conventionnelles en marge des hétéro et homo-normes, contre la propagande mainstream et les pouvoirs politiques en place. 
 
 
 
 
 
 
 
 
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L
Bonjour, ton article me touche beaucoup. Je me sens triste que la société humaine soit formatée à ce point. Il faut constamment être sur le qui vive pour avoir l'air "normal.e" afin de ne pas être rejeté.e, discriminé.e, moqué.e, harcelé.e, c'est épuisant.<br /> Tout ce temps et toute cette énergie perdue au lieu de pouvoir avancer et se consacrer à vivre.<br /> Je comprend bien que pour éduquer une nouvelle personne qui se développe et pour qu'elle puisse comprendre le monde il faille des supports, des exemples, mais notre système éducatif est si "simplifié" qu'il exclut toute forme de pensée alternative au formatage social binaire cis genre hétéronormé blanc sans handicap (visible ou non) ni particularité spécifique qu'il exclut toute différence. Il n'est pas inclusif mais exclusif.<br /> ça me déprime et j'ai envie de m'enfermer et de vivre seul.e caché.e sous ma couette.
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R
Joli texte en tout cas. J'ai l'impression d'avoir un genre un peu fluide personnellement. Parfois il m'arrive de parler de moi au masculin alors que je suis une femme. Je ne le fais pas exprès. ça n'arrive pas souvent non plus, mais ça arrive et c'est naturel chez moi. Je peux mettre des soutifs en dentelle, et le lendemain traîner torse nu toute la soirée dans mon appart, avec un shorty de mec. Pareil, j'aime bien mon corps tel qu'il est : féminin mais musclé (bras et abdos), chaque année plus fort, et en même temps chaque année plus en harmonie avec ma féminité. C'est un équilibre et je pense que nous avons eu la chance d'avoir un environnement familial / un éveil permettant de vivre cette richesse. Tout ce qui est binaire est limitant et par essence réducteur.
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_
N’empêche si tu n'arrive pas à avoir un style "androgyne" c'est compliqué :(
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